C’est l’histoire d’un homme, un anthropoïde riche d’une âme équilibriste. Un transformiste impénitent qui, au cours d’une nuée d’années, s’est tour à tour métamorphosé en victime débonnaire, bourreau méphitique, magnat automutilateur, pérégrin prédateur ou masochiste morbide.
Jusqu’au jour où, s’éveillant d’un postiche de coma, il découvrit les avantages de se pavaner en martyr… pernicieux.
Ne sachant plus quoi penser de son insignifiante existence, de ce temps dégoulinant qu’il ne parvenait plus à rendre précieux, il cru bon d’imaginer des machins toujours plus grands, des choses toujours plus grosses, plus folles… plus belles.
Longtemps, il apprit à repousser la vie, déjouer la mort, inventer et réinventer, composer et recomposer, quelque fois même tuer un temps qu’il jugeait éternel, pour finalement, comme une accommodante illusion, être subjugué par des bagatelles et des trucmuches stériles. A l’aune d’un tumultueux passé, il s’arrêta quelques instants sur ce qu’il avait bâti.
Tant de merveilles sur lesquelles draper ce regard tentaculaire…
C’est donc l’histoire de cet homme pétri de regrets. Derrière lui trainait du pied l’ombre de son obsolescence qui feignait de se faire pardonner. Alors, la tête cerclée de phalanges et les yeux ferrés par le ciel, il fit mine ; d’abord de se concentrer, puis de se raisonner pour finir, inspiré (convaincu qu’il avait mûri), par élaborer son ultime et facétieuse identité. Pendant sa méditation, la barbe lui poussa. Une moustache poivre et sel consuma les vestiges souillés d’une bouche nidoreuse. Il ne pouvait mot dire, prisonnier d’une condition qui ne l’élevait qu’à maudire.
Il s’arrêta, tétanisé.
Ses mains aux contours fantomatiques étaient méconnaissables. Pourtant, il s’agissait bien de ses dix doigts. Il leur reconnaissait ces formes malitornes. Mais cette couleur, cette odeur, ce n’était pas la sienne, pas celle pour laquelle son coeur battait depuis tant d’années. Elles lui rappelaient néanmoins son enfance à la campagne… À la mer même, quand de nigauds petits grains de sable se glissaient dans ses sandales pour lui chatouiller les orteils. Contemplant le bourgeon de ses souvenirs, il se devinait en chétif caméléon, se métamorphosant en ce que les grandes personnes poétisaient. Mais il n’était pas grand chose, il n’était qu’une mince feuille. Le vert lui allait si bien, comme aux milliers de petits greffons qui l’applaudissaient. Son panache avait changé, comme pour lui rappeler d’absoudre ses pêchés.
Faux-fuyant d’un honnête homme : écolo malgré lui
mars 15, 2010 par Stefann Keloù
Il fait un peu flipper ton homme…
Tu trouves ? Moi il m’inspire au contraire une certaine tendresse.
toute l’histoire humaine concentrée sur une vie
Toute l’histoire d’une vie concentrée sur un homme…
toute l’histoire d’un homme concentré sur son nombril